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Témoignages sur Pierre Brossolette

Résistants et personnalités politiques de l’époque

Ci-après des extraits de livres et de documentaires dans lesquels des Résistants et des personnalités politiques, qui l’ont bien connu pendant les années 30 ou pendant la Deuxième Guerre Mondiale (Résistance et France Libre ), citent Pierre Brossolette:

 

Jacques BAUMEL – Résistants

Résistants«  (…) Je reverrai plusieurs fois Brossolette (…) A chaque de ces rencontres, j’appréciai un peu plus la personnalité de Brossolette, son humour volontiers caustique, mais également une forme de gentillesse, d’attention que je n’aurais jamais pu soupçonner après notre première rencontre, et qui est quelque chose de rare chez ce type de personnalité toujours en mouvement, toujours entre deux projets. « 

« Pierre Brossolette est l’un de ces êtres d’exception dont on voit, au premier regard,que l’aile de l’ange les a frôlé ».

Résister – Histoire secrète des années d’Occupation – 1999, p. 269

 

Pierre BLOCH

pierre bloch« Je pense que l’unité de la France, celle des prisons, des maquis, de la France Libre, doit se poursuivre et, pour ma part, depuis 1940 j’ai appris à connaître des adversaires qui ont le même souci que moi de la patrie et du progrès social. Je ne fais pas de différence entre le socialiste Pierre Brossolette, le modéré Médéric, le communiste Péri et le royaliste d’Estienne d’Orves, ils ont tous servi la France avec la même ardeur.« 

Jusqu’au dernier jour, Albin Michel – 1983 – p. 231

 

Léon BLUM

Leon Blum« Lors d’une conversation avec Léon Blum en 1945, le radical Édouard Daladier devait observer qu’un certain nombre d’esprits réputés progressistes n’avaient malheureusement pas eu au long des années noires l’attitude qu’on était en droit d’attendre d’eux.

« Oui mais nous socialistes avons eu Pierre Brossolette », souligna Blum non sans fierté. »

par Éric Roussel, Pierre Brossolette, Fayard, 2011

« J’ai connu Pierre Brossolette quand il entrait à peine dans l’âge d’homme, j’ai vécu avec lui de longues années durant dans cette intimité particulière que crée la collaboration quotidienne au même journal. J’ai passé bien des jours avec lui dans les salles de rédaction du Populaire, bien de soirées et même bien des nuits au marbre de l’imprimerie.

Plus tard, dans ma prison, j’ai suivi aussi minutieusement qu’il m’était possible, les traces de son infatigable, de sa dévorante, de son éblouissante activité. Quand je pense à lui et que j’évoque son image, c’est le trait qui me parait le plus frappant en lui, plus encore peut-être que ce courage léger, gai, juvénile qui le poussait jusqu’à une incroyable témérité.

Je ne sais si de ma vie entière, j’ai jamais connu une (…) humaine d’un rendement égal au sien. Quel talent il a dépensé ainsi, avec une prodigalité insouciante. Il était de la race des plus grands journalistes, de ceux soi disant (…) traduit en réalité l’infinité de la culture, la promptitude et la sûreté du jugement, la fermeté des conditions personnelles.

De notre temps, la radio n’est plus séparable du journalisme écrit et le journaliste Pierre Brossolette devait en effet dans une des plus graves crises françaises, celle qui précéda Munich, tenir le micro de nos postes de État une lucidité, une présence d’esprit, un sens de persuasion et une intrépidité inoubliable. »

Allocution de Léon Blum sur Pierre Brossolette à la Sorbonne dans la manifestation commémorative du 22 mars 1945.

 

Émile BOLLAERT

Le 2 février 1944, Émile Bolaert tente de fuir avec Pierre Brossolette en Angleterre. Leur bateau fait naufrage au large du Finistère. Interrogés et torturés, Bollaert et Brossolette se croisent dans le souterrain de la prison : « Nous arrivons au 84 de l’avenue Foch où nous passons la nuit. Toujours rivés l’un à l’autre et attachés à nos chaises sans pouvoir échanger autre chose que quelques mots à voix basse. Le 20, nous sommes écroués à Fresnes. Le 22, nous sommes ramenés avenue Foch ; Je le croise dans le souterrain de la prison ; Il me dit bonjour furtivement, mais je lis dans ses yeux une froide résolution. Nous subissons un nouvel interrogatoire dans deux pièces contiguës ; J’entends ses cris comme il doit entendre les miens. Son interrogatoire se termine avant le mien ; Escorté de son bourreau, il rentre dans la pièce où je suis moi-même à la torture ; on le met au coin comme un enfant, la face tournée vers le mur. Il est midi. Nos policiers doivent aller déjeuner après une matinée aussi bien remplie. Nous sommes donc conduits au cinquième étage de l’immeuble, dans des chambres de domestiques transformées en cellules. Je ne devais plus revoir Pierre ; Ce n’est que quelques jours après que j’appris, par ces curieuses communications transmises à travers les murs de Fresnes, que Brossolette trompant la surveillance de son gardien s’était jeté de la mansarde voisine de la mienne et s’était écrasé au sol… Et c’est ainsi qu’a disparu l’un des plus nobles héros de la Résistance, l’un de ces soutiers de la Gloire à qui la France doit d’être redevenue indépendante, d’avoir retrouvé son âme et de pouvoir marcher vers de nouveaux destins. ».  Cliquez ici.

 

Gilberte BROSSOLETTE

gilberte Brossolette« Pierre ressentait et exprimait les pensées et les sentiments de la zone occupée: celle qui avait des uniformes allemands à chaque coin de rue, qui entendait à toutes les heures du jour des chœurs et les marches cadencées, celle dont les immeubles officiels regorgeaient d’organismes nazis, celle qui condensait sur son territoire toutes les polices vertes ou noires, en uniforme ou en civil, à croix gammée ou tête de mort. »

Il a fallu beaucoup de temps et beaucoup de catastrophes et d’arrestations dans l’ancienne zone libre, à son tour envahie par les Allemands en novembre 1942, pour qu’elle prenne conscience du combat clandestin.

(…) Jacques Debu-Bridel a lui aussi souligné la différence profonde entre patriotes des deux zones: « La zone occupée luttait contre l’Allemand, la zone Sud contre Vichy ».

(…) Personne, chez nos alliés, n’a mieux compris la lutte clandestine en France ni ses difficultés que ce « lapin » (Yeo-Thomas), cet homme d’une force morale hors du commun, cet indomptable que je verrai rester coi, après la guerre, alors qu’il voudrait évoquer en public la mémoire de Pierre mais se laisserait vaincre par l’émotion.

Il est vrai qu’il m’avait répété, quand je m’inquiétais à la veille d’un nouveau départ: « Je te l’ai déjà dit: Je ne veux pas devenir un rond-cuir de la Résistance. » 

Il s’Appelait Pierre Brossolette, Albin Michel, 1976

 
 

Jean-Louis CRÉMIEUX-BRILHAC

cremieux brilhac« L’intelligence dans l’improvisation a été quelque chose d’exceptionnel. Le sens politique et la rationalité de l’action de la France Libre est à prendre en compte aussi bien que le courage et héroïsme des gens. (…) À cette improvisation Brossolette était beaucoup mieux préparé, parce que Brossolette était un professionnel de la politique et du journalisme. Brossolette, d’autre part, était un esprit d’une rapidité fulgurante. Il y avait chez Brossolette quelque chose d’étonnant, c’était un esprit rapide et c’était un esprit dont la pensée dépassait la vôtre, il était toujours d’une association d’idées en avance sur vous.« 

Commentaire sur la mission Arquebuse-Brumaire, avec le colonel Passy et Pierre Brossolette (film-documentaire d’Étienne Goldet – 2002):

« Ce qu’ils réalisent en six semaines est à peine croyable. Courant de rendez-vous en réunions, forts de l’autorité de De Gaulle et aiguillonnés par l’absence de Moulin alors à Londres, ils font de Paris occupé, que les policiers quadrillent, la capitale de la Résistance, bousculant les structures et négociant les accords difficilement réversibles. La netteté polytechnicienne de Passy, son talent pragmatique d’improvisation se conjugue avec la rigueur d’analyse et la chaleur de conviction de Brossolette. Jamais sans doute dans l’histoire de la guerre clandestine esprits aussi clairs n’auront été aussi efficacement associés »

La Mission Arquebuse-Brumaire fût « décisive sur la voie de l’unification et de l’organisation de la Résistance ». La France Libre, Gallimard -1996 – p. 523

 

Christiane Desroches-Noblecourt

Christiane Desroches-Noblecourt« Cassou (Groupe du Musée de l’Homme) me chargea d’une mission de confiance à Paris. « Nous devons envoyer un Ambassadeur de le Résistance à Londres et c’est Pierre Brossolette qui a été choisi. Seulement il ne sait pas encore ». Allez le prévenir (…) vous lui direz qu’il est nommé Ambassadeur de la Résistance auprès du général De Gaulle. (…) Nous avons marchés jusqu’à la rue de la Pompe et nous sommes entrés dans la librairie. (…) Il est resté silencieux un bref instant puis il a dit: « C’est entendu. Je serai prêt dans deux jours le temps de prevenir ma femme ». Sa femme était admirable, m’a t’on rapporté. Les Allemands risquaient de se venger sur sa famille. Elle a donc attendu deux ou trois jours en écoutant la Radio « Les Français parlent aux Français », pour s’assurer que Pierre était bien arrivé à Londres. Dès que le message est passé à la BBC, elle est allée au Commissariat de son quartier en prenant un air affolé: « je viens signaler la disparition de mon époux, cela fait trois jours qu’il est parti avec sa sécretaire (…). Elle a joué une comédie formidable et les Allemands n’ont vu que du feu, à ce moment-là. »

Sur les regards des dieux, Albin Michel, 2009 – p. 129-131

 

André DEWRAVIN, alias Colonel Passy

dewavrin

« (…) J’ai déjà dans un grand nombre de notes corrigé les principales « erreurs » de Rex (Jean Moulin) dans ses premières pages de son rapport du 7 mai 1943 au général De Gaulle. Je me contenterai d’ajouter ceci: grâce à Brossolette, et en vérité à Brossolette seul, Rex trouva à son arrivée à Paris un Comité de coordination des chefs de mouvements prêts à fonctionner, avec lequel il fit connaissance aussitôt. Or, ce Comité ne fut par la suite ni modifié, ni augmenté et il ne cessa de travailler dans un esprit de loyauté et concorde auquel auquel il faut rendre hommage. (…) Nous avons vu, par ailleurs, comment fonctionnait le Comité directeur de Zone Sud, plus d’un an après sa création. Les comparer c’est juger la valeur de l’œuvre de Brossolette. En outre, lorsque ce dernier quitta Paris le 15 avril, le « Conseil National de la Résistance » réclamé par le général De Gaule était virtuellement édifié. Rex eut-il pu le réunir un mois plus tard sans le gigantesque travail de pionnier fait par Brossolette ? »

Missions secrètes en France – Souvenirs du B.C.R.A., Plon – 1954 – p. 235

« (…) Brossolette fut, sans conteste, l’homme qui par tous ceux que j’ai été amené à rencontrer dans ma vie, fit sur moi la plus forte impression. Son esprit pétrissait et assimilait les idées à une vitesse telle que bien peu de gens étaient capables d’en suivre le rythme étourdissant. Cachant sous des propos sanglants une très grande sensibilité, il me donna l’impression de tout comprendre, de tout prévoir, et d’être une des rares personnalités capables d’allier à un exceptionnel pouvoir d’analyse et de synthèse une prodigieuse intuition des réalités humaines. Comme beaucoup d’hommes au-dessus de la normale il provoquait dans son sillage des courants d’envie et de haine chez les médiocres ou les lâches, incapables d’apprécier le rayonnement de son extraordinaire intelligence.« 

Missions secrètes en France – Souvenirs du B.C.R.A., Plon – 1954 – p. 237

 

Henri FRENAY – Résistants

Résistants Henry Frenay
« Mais c’est avec Pierre Brossolette que je trouverai le plus d’affinités. Normalien, agrégé, il est au B.C.R.A. l’adjoint de Passy à qui le lie une solide amitié. Militant socialiste avant la guerre, il a une expérience qui fait de lui, en quelque sorte, le conseiller politique de son patron. En France déjà, nous nous sommes rencontrés. De la vie clandestine, des mouvements, de la Résistance, il a une expérience réelle. Contrairement à beaucoup d’autres, il sait de quoi il parle.(…) »

« La Gestapo frappe sans arrêt. Bollaert et Brossolette sont pris au moment oú ils s’apprêtaient à partir pour l’Angleterre (…). Ainsi disparaissait cet homme exceptionnel, adjoint et confident de Passy, parti en France pour réaliser l’unité des mouvements de Résistance dans la Zone Nord (…) Nous sommes quelques uns à nous demander si le cours des événements n’aurait pas changé dans la France libérée si Pierre Brossolette, notre ami, avait vécu. »

La nuit finira – Éditions Lafont/Opéra Mundi, 1975 – p. 355 et 123

 

Général DE GAULLE

general de gaulle(…) « Brossolette nous rejoignait ensuite, prodigue d’idées, s’élevant au plus haut plan de la pensée politique, mesurant dans ses profondeurs l’abîme où haletait la France et n’attendant le relèvement que du « gaullisme » qu’il bâtissait en doctrine. Il allait largement inspirer notre action à l’intérieur. Puis, un jour, au cours d’une mission, tombé aux mains de l’ennemi, il se jetterait lui-même dans la mort pour ne pas risquer de faiblir. »

Mémoires de Guerre, 1954

« Officier d’une rare énergie et d’une ténacité remarquable. Faisant preuve d’un mépris total du danger, a contribué avec succès à l’organisation de la Résistance en France et à l’union de tous les Français contre l’envahisseur ».

Citation signée par le général De Gaulle – Croix de guerre 1939-1945, le 25 mai 1943, avec Palme de Vermeil.

« Si Jean Moulin a été l’organisateur de la Résistance, Pierre Brossolette a été le philosophe du gaullisme. »

Lors de son séjour en Irlande, à l’Ambassadeur Emmanuel d’Harcourt, 1969

 

André GILLOIS

Andre-Gillois« Je me retrouve devant Monsieur André Dewavrin, alias Colonel Passy; qui me parle maintenant des socialistes. « Ils tenaient eux aussi à se reconstituer en tant que parti. (…) C’est Brossolette qui a amené Philip et ils étaient d’accord pour constituer après la Libération un grand parti travailliste. (…)« 

Histoire secrète des français à Londres – 1973 – p. 347

 

Stéphane HESSEL

stephane hessel« Brossolette est une rencontre absolument émouvante. J’étais là quand il est arrivé et qu’il est devenu mon chef, mon patron. Il était à côté de Passy, c’est lui qui a vraiment reformulé le BCRA dont j’étais l’un des membres à l’époque. C’est un homme d’une séduction extraordinaire, personne ne résistait à sa séduction. Quand on disait qu’il était brutal – en écriture – jamais en parole. Il était aussi courtois que possible. Mais, la grande différence c’est qu’il avait une vision politique qui n’était pas exactement celle du général de Gaulle. » (…)

(…) « Il faut présenter Brossolette comme quelqu’un qui savait où la France devait aller et il pensait qu’elle ne devait, en tout cas, pas aller comme la Troisième République avait été. Il avait des idées sur le fonctionnement le meilleur d’une démocratie, qui n’étaient pas celles de Jean Moulin.« 

La Grande Librairie – France 5 – Janvier 2005

 

Jean MARIN

Jean Marin« Il était de ceux dont nous avions de loin le plus suivi la lutte clandestine, si audacieuse et si féconde. En parlant avec lui, en l’écoutant faire ses récits avec autant de modestie que d’humour, nous nous disions :  » Voilà donc un de ces Français, nos compatriotes, qui, avec tant de courage, luttent pied à pied contre l’emprise allemande, contre la honte, contre le désespoir « . Pierre Brossolette était à nos yeux l’un de vos messagers, l’un de vos représentants. A travers lui, nous jugions nos compatriotes. Jamais nous n’oublierons la fraternelle gratitude que nous lui avons vouée, pour nous avoir apporté une image aussi belle, aussi pure, aussi exaltante du pays loin duquel les conditions de notre lutte nous retenaient. Lorsque nous vous parlions, lorsque nous vous disions de conserver à tout prix l’espérance, c’étaient ses propos et les propos de ses semblables, son action et l’action de ses compagnons qui nous inspiraient et qui donnaient à nos paroles leur plus claire justification. »

Dans le journal « Les Nouvelles » par Jean Marin, de l’équipe de la B.B.C. de Londres, mars 1945.

 

Daniel MAYER

Daniel Mayer« Nous éprouvions certaines difficultés à l’entendre à la  radio car à 19 heures beaucoup entre nous étaient au travail. Dès que quelqu’un entrait à la rédaction (du Populaire), venant de l’extérieur, on le hélait: « De quoi Brossolette a-t-il parlé aujourd’hui ? » S’il nous le disait, nous passions ensuite, des longues minutes à en débattre avec animation.

Il s’appelait Pierre Brossolette, par Gilberte Brossolette – Albin Michel – 1976

 

Edmond MICHELET

Edmond Michelet

« Pierre Brossolette est à mon sens celui dont la perte nous aura été peut-être la plus sensible… »

Chroniques de la Résistance, par Alain Guérin – Omnibus, 2000 – p. 566

 

Elisabeth DE MIRIBEL

miribel(…) « Je n’ai rencontré chez nul autre, durant ma vie, une telle gratuité dans l’esprit de sacrifice, ni une telle lucidité de jugement. Nous avons parlé pendant deux semaines, comme si nous étions seuls à bord. Il m’apparaissait comme l’âme de la Résistance. De son côté, il m’interrogeait avec une curiosité insatiable sur l’état de esprit des Français d’Amérique du Nord, sur la position des Canadiens et des Américains à l’égard du général de Gaulle. Je lui apportais une petite bouffée d’air du monde extérieur. Je respirais auprès de lui le grand souffle du combat pour la liberté.« 

La Liberté souffre violence – Éditions Plon, 1980 – Alger: l’avant-dernière étape, p. 122-127. Pour lire le texte en entier, veuillez cliquer ici.

 

René OZOUF

(…) Le nom de Pierre Brossolette donné à de nombreuses rues de Paris, de banlieue et de villes de province ainsi qu’à la cour d’honneur du Lycée Janson de Sailly dont il fut l’élève et au Centre National de la Radiodiffusion française à laquelle il appartint, – rappellera aux générations à venir l’exemple d’un intellectuel qui honora la pensée française, d’un journaliste laborieux et ardent, d’un historien qui préféra faire l’histoire plutôt que de l’écrire, d’un homme politique avide de liberté et de justice, d’un de ces  » soutiers de la Gloire  » à qui la France éternelle doit d’être redevenue indépendante, d’avoir retrouvé son âme et de pouvoir marcher vers de nouveaux destins… »

Pierre Brossolette – Héros de la Résistance, Clamart,  15 Février 1946 
Pour lire le livre entier (environ 40 pages), cliquez ici.

 

Christian PINEAU

Christian pineau

« Il m’avait donné rendez-vous dans la petite librairie de la rue de la Pompe qui était déjà un des centres de la Résistance française à ses débuts. Il voulait me demander des renseignements sur Libération-Nord dont il savait que j’assumais, alors, la responsabilité. Malgré mon extrême prudence, je n’hésitais pas à lui faire des confidences. Le nom de Pierre Brossolette me donnait déjà toutes garanties. Sa personnalité ne permettait pas d’hésitation ».

par Alya Aglan, La Résistance sacrifiée – Flammarion, 1999 – p. 143

« C’est grâce à Pierre Brossolette que notre groupe prend son premier contact avec Londres. (…) Ses idées correspondent aux miennes, nous constatons l’un et l’autre notre accord sur l’orientation à donner à nos mouvements. C’est alors qu’il me propose avec simplicité de partir pour Londres afin d’expliquer nos projets au général De Gaulle et aux anglais. »

Christian Pineau, La simple vérité, Éditions René Julliard, 1960 – p. 129

« Brossolette était un produit de la zone Nord et Moulin un produit de la zone Sud. Ils ne pouvaient avoir , de ce fait la même conception des priorités. Ils ne fréquentaient pas les mêmes gens, les mêmes responsables, et ne se heurtaient pas aux mêmes difficultés. (…) Voilà, je répète, l’essentiel : une différence d’expérience. Mais on peut ajouter, que les deux hommes, les deux héros, n’avaient ni le même tempérament, ni la même formation. Pierre était un enthousiaste, mais son enthousiasme était tempéré par le raisonnement. J’ai même envie de préciser: par le raisonnement d’un Normalien. Jean Moulin était de formation purement administrative. C’était un calme. Il avait sûrement de l’enthousiasme, lui aussi. Car il lui en fallait pour acquérir tand de force, tant d’abnégation. Mais c’était de l’intérieur. Il ne le manifestait autant dire jamais. Il était d’un entêtement farouche qui lui faisait répéter dix fois la même idée. Mais sa vision des évènements était sans doute moins large, moins étendue ou globale que celle de Brossolette, moins historique, si vous voulez. »

Gilberte Brossolette, Il ‘Appelait Pierre Brossolette, Albin Michel, 1976

 

René PLEVEN

Rene Pleven(…) »Sa vie, fut celle d’un homme qui avait toujours voulu vivre comme il pensait… Je n’ai jamais connu Brossolette acceptant un compromis avec ce qu’il croyait juste ou vrai. C’était un caractère sans petits côtés, sans mesquinerie ; aucune préoccupation de carrière, d’intérêt n’a jamais obscurci son jugement, ne l’a jamais fait dévier de ce qu’il croyait la bonne voie… Jamais je n’ai connu Brossolette découragé ; en revanche, je l’ai toujours vu prêt à se dresser, à lutter contre les hypocrisies, contre les illusions, contre les mensonges. Pendant cette grande et longue épreuve de la France, beaucoup d’hommes auront, comme lui, combattu, souffert et délibérément donné leur vie. Mais il y en a fort peu, je pense, dont on pourra dire avec autant de vérité, qu’il fut uniformément, continûment, depuis l’âge d’homme jusqu’à sa fin, intransigeant avec lui-même, un modèle de rectitude et de loyauté. J’ai dit que Brossolette avait vécu comme il croyait ; c’est le deuil de la France que, pour sa délivrance, il ait fallu qu’il meure comme il avait vécu et comme il avait cru « .

par René Ozouf – Pierre Brossolette, Héros de la Résistance, librairie Gedalge, 1946

 

André POSTEL-VINAY – Résistants

 

Postel Vinay
« Je ne veux pas terminer ce livre sans redire mon admiration pour Pierre Brossolette (…) Le souvenir de Pierre Brossolette évoque pour moi l’image exacte du héros. Le héros, c’est celui qui va jusqu’à la limite du courage et au-delà, qui renouvelle sans cesse son effort et qui en meurt. Brossolette est mort de ce courage insatiable.

Mais l’héroïsme, c’est autre chose aussi. Il n’y a pas de véritable héroïsme si l’on garde des illusions sur les hommes, pas d’héroïsme vrai sans vision réaliste des évènements et de leurs lendemains désenchantés. Il n’y a pas non plus d’héroïsme sans la vivacité d’imagination qui fait mesurer à l’avance l’ampleur et les détails du péril. Or, je n’ai jamais rencontré personne qui m’ait donné plus que Brossolette, le sentiment d’une perspicacité rigoureuse, d’une intelligence aigüe, imaginative et réaliste à la fois.

Cependant, l’héroïsme vrai, malgré sa clairvoyance, malgré l’esprit d’ironie que peut lui donner son absence d’illusion, l’héroïsme vrai ne saurait exister sans cette générosité passionnée, sans cet extraordinaire dévouement au progrès de l’humanité d’où lui viennent son inspiration et sa force. Et ce héroïsme vrai se caractérise aussi par sa simplicité, son humour et sa gaité, par une disposition poétique et romantique de l’esprit.

Or, tous ces dons existaient au plus haut point, d’une façon saisissante, chez Brossolette. Et c’est pourquoi, lorsqu’en 1944, j’ai appris sa mort et comment il était mort, j’ai éprouvé à la fois une tristesse extrême, le remords d’être vivant et le sentiment d’une grande perte pour la France : une grande perte, parce que, tels que je voyais sa personnalité et son rayonnement, je pensais que Brossolette aurait pu jouer, après la victoire, un rôle de tout premier plan dans notre vie politique et les transformations nécessaires à notre pays.« 

Un fou s’évade – Souvenirs de 1941 – 1942 – Collection Liberté – Mémoire, Éditions du Féllin, 1997- p. 201 – À la mémoire de Pierre Brossolette

 

Gilbert Renault, alias colonel REMY – Résistants

 
Résistants« Pour sa part, Paco me propose de déjeuner avec Pierre Brossolette, journaliste très connu, dont il me dit grand bien. Brossolette écrivait dans « Le Populaire » tandis que j’étais une fidèle lecteur d' »Action Française ». C’est dire que ses convictions politiques sont aux antipodes de miennes. D’autre part, l’homme m’a été dépeint sous les traits d’un arriviste forcené. Je commence par refuser de le recevoir, mais me gourmande tout aussitôt: je n’ai pas le droit d’opposer mes goût et mes opinions à une très bonne volonté, d’où qu’elle vienne. Je vois donc Brossolette, qui me séduit par sa vive intelligence, et la flamme qui le consume. » Je le prie de rédiger une revue de presse qui viendrait compléter mes courriers, ce qu’il accepte. »
 
Rémy – Mémoires D’un Agent Secret De La France Libre. Juin 1940 – Juin 1942, janvier 1946
 
 

Maurice SCHUMANN

Maurice Schumann« En cette fin d’avril 1942, rares étaient les émissaires de la France militante et souffrante à la France libre et combattante, plus rares encore les privilégiés admis à leur serrer la main, à reprendre force en touchant leur vaillance. Quand on m’a dit que M. Bourgat m’attendait, je ne pensais point que M. Bourgat pût être un cacique de l’École Normale Supérieure et de l’agrégation d’histoire, un journaliste connu de tout Paris. un chroniqueur radiophonique dont le nom même avait suscité – je le savais – des inimitiés tenaces et des amitiés passionnées. Je savais que Pierre Brossolette plutôt que de prostituer sa plume ou de chercher un accommodement quelconque avec le malheur de la France, ou même de considérer d’un œil triste et passif le crépuscule de l’intelligence et de la liberté, avait, pour nourrir les siens, ouvert devant son vieux Lycée, une boutique de libraire. Je trouvais cela très bien, je ne pensais point qu’un homme aussi notoire pût risquer beaucoup plus : je ne connaissais pas Brossolette, du moins tel qu’il était.

Je ne savais pas que l’épreuve de 1940, en asservissant la Patrie, avait libéré tout ensemble ce qu’il y avait de pire chez les mauvais et de meilleur chez les bons. Après avoir pendant cinq minutes écouté M. Bourgat, il me paraissait impossible de trop attendre de la France, il car il ne disait jamais  » je « , il disait toujours  » nous « , avec une sécheresse froide qui me donna d’emblée la certitude que  » nous  » voulait dire des millions. Son intelligence ordonna à mon enthousiasme, non pour le tempérer, mais, au contraire, pour l’exalter. Avant lui, je croyais à la flamme de la Résistance ; après lui, je crus à sa force ; avant lui, je croyais à la France fervente et fidèle, après lui, je crus à la France puissante dans son refus organisé, dans sa colère articulée, dans sa douleur combattante. Il me guéri du mythe de la grandeur morale pour m’ouvrir, comme disait le poète anglais, les portes d’or de la grandeur tout court… « 

Discours à la Sorbonne dans la manifestation commémorative du 22 mars 1945.

« C’est le 25 août 1944 que nous avons senti l’irréparable poids de son absence. A l’instant précis où le Général DE GAULLE, au lieu de prendre place dans l’une de ces voitures officielles qui interposent une muraille mouvante entre le peuple et ses guides, posa le pied sur le premier pavé des Champs-Élysées, nous fûmes saisis d’une atroce angoisse. La plus belle seconde qu’un homme pût vivre nous faisait mal au cœur, il est vrai que le ciel était lourd de tous les morts qui, en choisissant leur place dans la bataille, avaient, pour toute récompense, entrevu cet instant. Mais leur visage meurtri se composait en une seule et les lèvres de Pierre BROSSOLETTE n’étaient point closes. Elle se rouvraient pour relire la prophétie tranquille et chaleureuse que, le 23 septembre 1942, elles avaient énoncée, tout près de moi, dans un studio souterrain de la BBC : A vous tous qu’a soulevé d’un même souffle le geste du 18 juin 1940, je dis : Français, ne craignez rien, l’homme est à la mesure du geste, et ce n’est pas lui qui vous décevra lorsqu’à la tête des chars de l’armée de la délivrance, au jour poignant de la victoire, il sera porté tout au long des Champs-Élysées, dans le murmure étouffé des longs sanglots de joie des femmes, par la rafale sans fin de vos acclamations. Savait il le prophète du 23 septembre 1942, qu’il ne serait point-là le jour où s’accomplirait la parole! Quand il écrivit sa longue phrase et quand il la polit et quand il la relut et quand il la prononça, eut-il peur, lui qui n’avait point peur, des images que lui proposait son propre verbe il était bien trop actif et bien trop grand pour prendre la peine d’avoir un pressentiment Plus simplement, plus noblement, il était de ces hommes qui, par horreur du destin subi se livrent au destin choisi, sans se retourner sur autrui, ni peut être sur eux-mêmes. Il y a quelque chose de plus beau que la dernière lettre d’un condamné à mort pour délit d’espérance, c’est le silence de l’abnégation. »

Sur le Mémorial des Compagnons de la Libération, page 267.

 

Philippe SOUPAULT

soupault« Un homme perspicace sans être cynique, si modeste, orgueilleux sans être vaniteux »

 Mémoires de l’oubli (1927-1933) t. III, Paris, Lachenal & Ritter, 1997

 

« Je crois que Pierre Brossolette était non seulement un grand journaliste, mais le modèle de journaliste. Quand j’ai à juger un être, un évènement, quand j’ai à résoudre un cas de conscience,  je ne puis m’empêcher de dire toujours : que dirait Brossolette ?

Ces cinq années furent si lourdes d’angoisse, celles qui précédèrent la guerre et la catastrophe que chaque nuit. Chaque nuit travailler sur une salle de rédaction  sous la même lampe, partageant le même encrier et formant une équipe avec celui qui fut un des plus sincères, un des plus lucides, un des plus grands journalistes de son temps, avec Pierre, avec celui que nous appelions affectueusement  « Brosso ».

J’ai été fier d’être son compagnon et de le voir travailler.  J’admirais cette intelligence sans défaillance, cette force nerveuse, cette conscience et cette lucidité, qui nuit après nuit illuminait le travail souvent ingrat du journalisme quotidien et de notre besogne nocturne. On s’inclinait tout naturellement devant son jugement. Dans la salle de rédaction, aussi bien que dans l’atelier devant le marbre, il suffisait que Brossolette donna son avis pour que nous soyons tous d’accord. Je me suis souvenu avec quel respect le garçon de bureau, m’apportant une dépêche, me disait : Monsieur Brossolette vous fait dire qu’il faut la faire passer.

Nous avions confiance en lui.  Brossolette fut et demeure un exemple. »

Allocution de Philippe Soupault sur Pierre Brossolette à la Sorbonne dans la manifestation commémorative du 22 mars 1945.

 

Jacques SOUSTELLE

Jacques SoustelleAu sujet de la réorganisation du BCRAM qui devient BCRA, Soustelle a dit: « Pierre Brossolette a exercé sur le développement de la Résistance et de nos services une influence peut-être supérieure à celle d’aucun autre homme pris individuellement !« 

Guy Perrier – Pierre Brossolette, Le visionnaire de la Résistance, Hachette, 1997

 « (…) d’un talent vigoureux et d’une dialectique pénétrante ».

Jacques Soustelle – Envers et contre tout – 1974, pag. 312

 

 Roger Salomon Ginsburger, alias Pierre VILLON – Résistants

RésistantsLa naissance du CNR est précédée par plusieurs rencontres et la constitution d’un Comité de coordination pour la zone nord. « Je rencontre d’abord Pierre Brossolette, au début de février 1943, par l’intermédiaire de Pierre Meunier (…), Brossolette m’expose ses conceptions – à Londres, face à de vieux bonzes socialistes attachés aux habitudes du passé, de nombreux jeunes, comme lui, veulent transformer profondément la vie politique française. Lui-même aspire à la création, d’un vaste parti travailliste unissant les débris de la SFIO, du radicalisme et les démocrates chrétiens. Travaillisme flanqué à droite d’un petit parti conservateur, et à gauche du PCF (dont il ne dit pas – mais c’est plus ou moins sous-entendu – qu’il doit lui aussi rester assez étriqué) ».

C’est alors que tu signes, après l’avoir modifié, un texte préparé à Londres, affirmant une entière confiance dans le général de Gaulle et le Comité national pour réaliser l’union de tous les Français de la métropole et de l’Empire, pour libérer la France et redonner la parole au peuple français.  « Nous y faisons intégrer deux adjonctions d’importance : l’indication que la lutte est déjà engagée par certains et la précision que le mot dictature s’applique aussi à Vichy. Au cours de la même séance, nous tombons d’accord:
1° Sur la nécessité que soit représentées au CNR toutes les « nuances de l’esprit français résistant », notamment les forces politiques.
2° Sur la création d’un Comité de coordination des mouvements de Résistance de zone nord.

Enfin, Brossolette nous annonce l’arrivée d’un mystérieux Rex (Moulin), chargé de mettre sur pied le CNR. »

Entretiens avec Claude Willard. Éditions sociales Paris 1983 (Extraits)

 

F.F.E. YEO-THOMAS, alias Shelley

Yeo thomas« « When I look back on those days, I can picture the daily talk we had. They always took place in the evenings, in the flat occupied by Passy and Brossolette in rue Marcel Renaud, in a small backroom where there was a wood-burning Mirus stove. Heating was a problem as fuel of any description was scarce… Electricity and gas were impossible to use. We managed to get a little wood in the black market, and our greatest luxury was a fire in this room at nights. Colonel Passy would sit in an old armchair one side of the stove, I would seat in another armchair in the opposite side, whilst Brossolette would sprawl full lenght on the floor between us, as close as he could to the stove, as he was very fond of warmth and suffered much from the cold. (…) When we had gone over all the problems we had to deal with, we would either fall silent and think our own thoughts, or we would talk about our loved-ones, our plans for the future if we survived, the shape of things to come. Sometimes, Brossolette, who was an historian, would hold forth, and we would listen enthralled. We got on famously together in spite of the abysmal fondamental differences in our upbringings. We had a common ideal, and each of us relied upon the two other! Brothers could not have been closer than we were. There grew between us a bond that nothing short of death could break.« 

Mark Seaman, Bravest of the Brave, the True Story of Wing Commander « Tommy » Yeo-Thomas – SOE Secret Agent – Code Name « The White Rabbit » – Michel O’Mara Books, 1997 – p. 83